Par Augustin Scalbert | Rue89
Nathalie est cadre dans un célèbre cabinet d'audit anglo-saxon. Elle ne le sait pas encore, mais ses collègues s'échangent dans son dos des photos d'elle en leggings. Nathalie a posté sur son profil Facebook des images de ses séances de yoga. Elle n'a sans doute pas entendu parler des « privacy settings » (les paramètres de confidentialité). Grave erreur : déjà peu appréciée par son équipe, elle ruine ainsi une partie de son autorité sur ses subordonnés.
Le tort de cette manageuse, c'est d'avoir accepté d'être « amie » avec l'un d'entre eux. Les rapports hiérarchiques sont difficilement compatibles avec l'« amitié » sur un réseau social comme Facebook.
« Mon patron n'a pas à savoir qui je suis réellement »
Marie [les prénoms ont été changés, ndlr] travaille dans la branche française d'une agence de publicité de taille mondiale. Comme souvent dans ce secteur, l'agence a un « network » à son nom sur Facebook. « Je n'accepterai jamais mon patron comme ami sur Facebook », dit-elle. « C'est mon espace privé, avec des amis qui sont en dehors de l'entreprise. Mon patron n'a pas à savoir qui je suis réellement, en dehors de mes compétences professionnelles. En plus, ça peut être un moyen de flicage. »
Alors depuis que l'agence a demandé à ses employés du monde entier de s'inscrire sur Facebook -« car c'est un outil viral et de connexion incroyable“-, elle a ‘toujours refusé’ les ‘friend requests’ de ses collègues :
‘Je n'accepte personne de mon entreprise comme ami. S'il le faut, je l'explique à la personne : c'est un espace intime, tout comme ma vie en dehors du bureau. Personne n'a à connaître certaines choses sur moi, pas plus que ce que je fais à l'extérieur.’
Aurélie a accepté, mais cela la conduit à l'autocensure
Aurélie a réagi différemment. Chargée de communication dans l'industrie du luxe, elle juge ‘impossible de refuser son patron comme ami sur Facebook : ce serait mal vu.’ Elle est donc ‘amie’ avec ses deux supérieurs hiérarchiques directs. ‘En refusant, je risquais de les froisser, ils auraient trouvé que je ne jouais pas le jeu.’ Elle vit cette situation comme ‘une intrusion dans la sphère privée’ :
‘En plus, ça me bloque dans mon expression : je n'utilise jamais les applications un peu fantaisistes comme friends for sale’, par exemple.”
Aurélie juge pourtant “sournoise” l'utilisation de Facebook au bureau. “L'entreprise a bloqué le site pour qu'on ne l'utilise pas pendant les heures de travail. Quand on est connecté sur Facebook, on passe pour des fumistes, car ça ne sert à rien.”
Dans la pub, c'est différent : “Chez nous, quand on est sur Facebook, c'est du travail”, raconte Marie, qui trouve que c'est “plutôt une bonne chose”. Pour elle, l'effet pervers est ailleurs :
“Facebook aligne les rapports sur un pied d'égalité, et c'est mauvais pour la relation patron-employé.”
Moralité : que vous acceptiez ou non de faire ami-ami avec votre patron sur Facebook, pensez à paramétrer vos “privacy settings”.
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